mardi 12 juillet 2011

Avez-vous l'Innovation Attitude ?

Sans rentrer dans le sempiternel débat entre innovation de rupture et innovation incrémentale (nous aurons sans doute l'occasion d'échanger à ce sujet à d'autres occasions), je tenais ici à faire part de ma vision en ce qui concerne les paramètres, voir les règles, à prendre en compte pour se donner toutes les chances de succès lorsque l'on se lance dans un processus d'innovation.


1. Partir de ses idées ou bien partir d'outils pour trouver des idées ?
Je suis partisan de l'utilisation des nombreux outils d'aide à la créativité qui font tous la part belle à la vertu de la page blanche et qui rejettent au second plan, voir au fin fond des oubliettes, l'idée de génie, l'idée préconçue sans prendre soin de la confronter à d'autres idées qui pourraient s'avérer bien meilleures. En d'autres termes, même si vous pensez avoir trouvé une idée de génie ce matin en vous brossant les dents, je vous recommande fortement de ne pas oublier de la décortiquer avec soin, de la challenger, de la bousculer,  en la soumettant à la moulinette d'outils de créativité qui la feront ressortir (ou pas) du lot d'un tas d'autres (bonnes) idées potentielles.


2. Partir des besoins de ses marchés ou pas ?
Je serai très pragmatique à ce sujet. Oui, il faut partir de SES marchés, mais pas uniquement de SON marché. En effet, il faut se poser la question de l'élargissement de son horizon : qu'est-ce qui pourrait faire que MON marché d'aujourd'hui se trouve élargi à d'autres marchés, que je puisse attirer d'autres segments de clientèle à ce jour réservés à d'autres produits ou services qui ne sont pas les miens.
On parle souvent d'innovations qui sont nées sans forcément répondre à un besoin exprimé par le marché (par exemple le téléphone portable, ou Facebook ...). Je ne pense pas que ces idées aient été produites en totale déconnection du marché. Je pense que leurs inventeurs se sont fortement inspirés de tendances, de besoins, de produits, de services observés sur d'autres marchés, complémentaires, concurrents ou parallèles aux leurs. Mais attention, partir des besoins de SES marchés implique que l'on soit capable de les connaitre, de les identifier, de les percevoir, et qui sait, peut-être de les devancer ...


3. Comment favoriser la créativité ? Comment trouver THE idée ?
Tout est une question d'état d'esprit. Il faut faire fi de ses blocages perceptifs (n'oublions pas de faire fonctionner nos 5 sens), de ses blocages culturels (les bonnes idées n'ont pas de frontière, pas de sexe, pas de religion, pas de couleur ...), de ses blocage émotionnels (un jugement hâtif, instinctif n'est pas compatible avec un esprit propice à la créativité). 
Il vaut mieux adopter l'attitude de l'avocat de l'ange plutôt que celle de l'avocat du diable. Ne voyez pas d'abord les aspects négatifs liés à une proposition d'amélioration, mais bien ses côtés positifs. Il sera toujours temps de critiquer négativement une idée, et au final de la tuer, lorsque vous serez certain d'en trouver une meilleure ...


Le processus habituel du cheminement de la pensée suit le schéma suivant :
Logique --> Raisonnement --> Interprétation --> Ressenti --> Décision
Un cheminement propice à la créativité devrait faire abstraction des 2 premières étapes :
Interprétation (mais libre) --> Ressenti (mais positif) --> Décision (mais encourageante)

4. Faut-il se donner des contraintes pour être créatif ?
OUI ! La créativité nait de la contrainte. Attention, je ne parle pas ici d'artistes, qui font plus de la création que de la créativité. Des limites dans le temps, dans l'espace, dans certaines règles mobilisent les ressources de notre cerveau bien plus efficacement que si nous opérons sans contrainte. Cela s'applique à deux niveaux : premièrement cela permet de franchir des obstacles (qu'inventer si rien ne nous empêche d'avancer ? ...), et deuxièmement cela vaut aussi pour les méthodes de créativité elles-mêmes (mieux vaut par exemple réaliser des séances de brainstorming dans des temps limités (mais pas trop), avec un nombre de participants limités (mais pas trop ...)).
La contrainte, en ce qui concerne les outils de créativité doit être utilisée à bon escient : il faut savoir alterner entre divergence (on se lâche, on jette ses idée, on s'impose un minimum de contraintes) et convergence (on recadre et élimine les idées les plus farfelues).

5. Par quelles étapes passer pour être créatif ?
Nous rentrons ici dans les recommandations de méthodes et d'outils. Personnellement, et sans préjuger des outils à utiliser,  je préconise le respect des étapes suivantes :

  • S'imprégner, observer la situation actuelle
  • Se définir des objectifs clairs en définissant la situation désirée, l'amélioration à obtenir
  • Imaginer un maximum d'idées sans contrainte, en privilégiant l'intuition, en osant le défi, en mettant la barre haute, en mettant provisoirement la critique hors jeu, en faisant preuve d'originalité, en confrontant ses idées à plusieurs, et en prenant le temps de murir ses idées
  • Sélectionner les meilleures idées au regard de ses contraintes
  • Mettre ses idées le plus rapidement possible en action
  • Faire preuve de ténacité pour défendre ses idées et franchir les obstacles

6. Quels outils utiliser pour encourager, favoriser et faire la part belle à la créativité ?
Des bibliothèques entières pourraient être remplies de livres traitant de ce sujet. Personnellement j'aime beaucoup celui de Luc de Brabandere et Anne Mikolajczak "Le Plaisir des idées" (Ed. Dunod).
Je souhaite ici mettre en avant 3 outils que je juge particulièrement efficaces :
  • Le scénario catastrophe
Il s'agit de définir la représentation la plus négative de l'objectif à atteindre : "comment faire pour être certain de parvenir à un échec ?". 
Par exemple l'objectif "comment faire en sorte que l'utilisateur de mon appareil ne se blesse pas ?" devient dans cet exercice "comment être sûr que l'utilisateur de mon appareil se blesse ?", ou encore "comment faire pour être certain de garder l'attention de mon auditoire ou de mon lectorat ?" devient "comment être sûr de démobiliser l'attention ?".
L'exercice consiste dans un premier temps à lister toutes les idées qui effectivement peuvent conduire à la catastrophe, puis, dans un second temps de les regrouper par familles et de transformer en positif chacune des idées catastrophe en expliquant comment on pourrait ou devrait faire pour les éviter.
C'est redoutablement efficace pour faire naître un tas d'idées que l'on n'aurait pas envisagées sous l'angle "positif" des choses ...
  • La boîte à idées
Oui, je sais, certains pensent que ce n'est que se donner bonne conscience en mettant en place dans son entreprise un tel mécanisme et que ce n'est pas efficace. C'est efficace (demandez à une entreprise comme Cargill se qu'elle en pense), à condition de remplir les conditions suivantes :
- fonctionnez par campagnes sous la responsabilité d'un comité en charge de la communication de la campagne, de la récolte des idées et du choix des bonnes idées,
- veillez à ce que le temps entre l'annonce d'une nouvelle campagne et la mise en application de la ou des meilleures idées ne soit pas trop long (typiquement quelques semaines seulement),
- Prévoyez deux catégories de campagnes : une pour améliorer l'offre client final (le produit et/ou les services associés), et une autre pour améliorer les process internes,
- Multipliez les campagnes les unes après les autres.
  • Le challenge/concours interne
Dans la même logique de campagnes que pour la boîte à idées, lancez un sujet ambitieux sous forme de concours à l'intérieur de votre entreprise. Constituez des équipes (dont la taille pourra varier en fonction de votre entreprise : inter-services ou inter-sites ou pour les multi-nationales inter-pays) et demandez-leur de plancher sur le sujet et de remettre leurs copies qui pourront faire l'objet de présentations à l'occasion d'un séminaire, d'un rassemblement global de l'entreprise. Récompenses à la clé, bien entendu.
Des idées de sujets à lancer ?
- avez-vous une idée pour que notre produit soit le seul parmi nos concurrents à disposer d'une fonctionnalité unique ?
- avez-vous une idée qui pourra générer 100.000 € (ou pourquoi pas 1 million ? ...) de profit à notre entreprise ?
- avez-vous une idée pour faire en sorte que notre savoir-faire que nous appliquons depuis des décennies en tant que sous-traitant, puisse faire naître un produit en nom propre ?
- avez-vous une idée pour que nous ajoutions à notre gamme de produits professionnels (ou de services aux professionnels) un produit/service qui s'adresse au marché du grand public ?

7. Au final, comment saurais-je si je dispose de l'I.A.(*) ?
Bien sûr lorsque vos efforts d'encouragement à la créativité auront trouvé leur concrétisation par la naissance d'une, puis de deux, puis d'autres idées rémunératrices. Mais pas seulement. Cela peut prendre du temps (rappelez-vous, il faut être tenace). 
Vous saurez que vous avez la bonne attitude lorsque vous et vos collaborateurs retirerez du PLAISIR à créer en partant de la page blanche, à prendre le contre pied des idées reçues, et à sortir des sentiers battus. Lorsque vous et vos collaborateurs serez en permanence à l'ECOUTE des tendances, à vouloir les déchiffrer et les décrypter. Lorsque vous et vos collaborateurs aurez pris conscience que toute nouvelle RENCONTRE, toute confrontation sont mères nourricières de votre créativité.



(*) Innovation Attitude et non Intelligence Artificielle ...

1 commentaire:

  1. C'est un article très intéressant et riche en idées! La démarche marketing s'enrichit toujours de la créativité et de savoir sortir du cadre, même si ce n'est pas toujours facile!
    Merci de nous rappler tous ces axes.
    Nathalie

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